Seuls 4 types de documents sont aujourd'hui soumis à des exigences réglementaires de potentielle remise en papier
Pour rappel, si l'envoi numérique est l'approche recommandée par défaut, le professionnel doit obligatoirement être en capacité de fournir la version papier au patient si celui-ci en fait la demande.
Par ailleurs, il n’y a que 4 cas de figure pour lesquels un mode de communication vis-à-vis du patient estexplicitement prévu dans le CSP.
1. Remise "papier" de la lettre de liaison
A date, l’article R1112-1-2 du CSP dispose : « I.-Lors de la sortie de l'établissement de santé, une lettre de liaison, rédigée par le médecin de l'établissement qui l'a pris en charge, est remise au patient par ce médecin, ou par un autre membre de l'équipe de soins mentionnée au 1° de l'article L. 1110-12 qui l'a pris en charge, et qui s'assure que les informations utiles à la continuité des soins ont été comprises. Dans le respect des dispositions des articles L. 1110-4 et L. 1111-2, la lettre de liaison est transmise le même jour, au médecin traitant et, le cas échéant, au praticien qui a adressé le patient. Elle est adressée par messagerie sécurisée répondant aux conditions prévues à l'article L. 1110-4-1, ou par tout moyen garantissant la confidentialité des informations, et versée dans le dossier médical partagé du patient si ce dossier a été créé.
Cet article oblige à une « remise » de la lettre de liaison au patient le jour de sa sortie sous un format papier
Dans le cadre des évolutions réglementaires portées par le Ministère (décret DMP qui devrait entrer en vigueur en 2024), cette remise en main propre pourra être substituée par une version dématérialisée.
La lettre de liaison au médecin traitant (et au correspondant médical) tient lieu et remplace l’ancien compte-rendu d’hospitalisation (CRH) conformément au décret n°2016-995 du 20 juillet 2016 relatif aux lettres de liaison. D’un point de vue technique, pour être identifié en tant que lettre de liaison de sortie dans Mon espace santé, l’établissement devra respecter le type code d’alimentation du DMP suivant : 11490-0.
2. Dématérialisation par défaut des résultats des examens de biologie
Pour ce qui concerne les résultats de biologie, le mode de transmission est électronique, sauf si le patient demande une remise sur support papier : « La communication du compte rendu au patient s'effectue par la voie électronique ou, à sa demande, sur support papier. » (Article D6211-3 du CSP)
Pour les résultats de biologie le mode de transmission est électronique, sauf si le patient demande une remise sur support papier.
3. Modes de communication du dossier médical géré par le praticien selon le choix du patient
L’article L1111-7 du CSP dispose “Toute personne a accès à l'ensemble des informations concernant sa santé détenues, à quelque titre que ce soit, par des professionnels de santé, par des établissements de santé par des centres de santé, par des maisons de naissance, par le service de santé des armées ou par l'Institution nationale des invalides qui sont formalisées ou ont fait l'objet d'échanges écrits entre professionnels de santé, notamment des résultats d'examen, comptes rendus de consultation, d'intervention, d'exploration ou d'hospitalisation, des protocoles et prescriptions thérapeutiques mis en œuvre, feuilles de surveillance, correspondances entre professionnels de santé, à l'exception des informations mentionnant qu'elles ont été recueillies auprès de tiers n'intervenant pas dans la prise en charge thérapeutique ou concernant un tel tiers.”
Les comptes rendus, ainsi que les autres pièces du dossier médical (à l’exception des informations recueillies auprès de tiers n’intervenant pas dans la prise en charge concernant de tels tiers) doivent être communiqués au patient, dès lors qu’il en fait la demande.
L’article R 1111-2 du CSP indique explicitement le choix offert au demandeur d’obtenir une copie « papier » : « À son choix, le demandeur obtient du professionnel de santé ou de l'établissement de santé communication des informations demandées, soit par consultation sur place, avec, le cas échéant, remise de copies de documents, soit par l'envoi de copies des documents. Les frais de délivrance de ces copies sont laissés à la charge du demandeur dans les conditions fixées par l’article L1111-7 ».
En pratique, le remise du dossier médical peut être réalisée au format papier ou électronique, au choix du patient et selon les possibilités techniques du professionnel ou de l’établissement.
4. Mise à disposition de l'Ordonnance numérique
Qu'est ce que l'Ordonnance numérique ?
L’Ordonnance numérique consiste à dématérialiser et sécuriser le circuit de la prescription entre les prescripteurs et les professionnels de santé prescrits, afin de favoriser la coordination des soins.
Elle permet également aux patients de retrouver leurs ordonnances au format numérique dans Mon espace santé, grâce à l’alimentation automatique du DMP à partir du logiciel métier du prescripteur.
Ainsi, une Ordonnance numérique produite dans le logiciel du prescripteur bénéficie d’un QR code vérifié en temps réel par le téléservice Ordonnance numérique de l’Assurance Maladie permettant son identification unique. Le logiciel du prescripteur envoie aussi automatiquement l’ordonnance dans le profil Mon espace santé du patient (qu’elle soit issue de l’appel au téléservice e-prescription ou en format « papier »).
Quelles sont les modalités de l'Ordonnance numérique ?
Le Décret n° 2023-1222 du 20 décembre 2023 relatif à la prescription électronique vient en préciser les modalités ainsi que les conditions de dématérialisation.« Art. R. 4072-3.- Le professionnel qui établit une prescription dématérialisée au moyen des téléservices mentionnés à l'article R. 4071-1 remet au patient une ordonnance établie sur papier, sauf si le patient exprime le souhait de la recevoir exclusivement au moyen de la messagerie sécurisée mentionnée à l'article L. 1111-13-1.”
« Art. R. 4073-2.-Les professionnels mentionnés aux articles L. 4071-1 et L. 4071-2 ne sont pas tenus de procéder par voie dématérialisée dans les cas suivants : 1° Indisponibilité des téléservices mentionnés à l'article R. 4071-1 ; 2° Connexion internet insuffisante liée à la situation du lieu habituel d'exercice ou à l'accomplissement d'actes en dehors de ce dernier ; 3° Impossibilité technique ponctuelle d'accès aux téléservices mentionnés à l'article R. 4071-1, ou impossibilité technique durable pour une cause étrangère au professionnel ; 4° Absence, pour le professionnel qui exécute la prescription, d'une prescription dématérialisée ; 5° Impossibilité d'identification du patient via les services numériques en santé dédiés ; 6° Prescription occasionnelle pour soi-même ou pour son entourage ; 7° Pour les professionnels du service de santé des armées, conditions d'exercice des missions faisant obstacle à la mise en œuvre de cette obligation. Dans tous ces cas, le prescripteur établit une prescription sous format papier, sans préjudice des obligations de versement dans le dossier médical partagé de l'assuré ou de transmission par messagerie sécurisée en application des articles L. 1111-14 et L. 1111-15. »
Ce décret précise également que les Ordonnances numériques, y compris pour la prescription de stupéfiants peuvent être imprimées sur papier libre dès lors qu’elles ont été enregistrées avec succès dans la base Ordonnance numérique de l’Assurance Maladie.
A date, l’Ordonnance numérique est en cours de déploiement dans les logiciels des médecins de ville et des pharmaciens d’officines, bientôt chez les sage-femmes et les chirurgiens-dentistes, ainsi que les auxiliaires médicaux. L'intégration de l'Ordonnance numérique n'est pas encore déployée dans les systèmes d'information hospitaliers pour les Prescriptions Hospitalières Exécutées en Ville (PHEV). Néanmoins, les copies des ordonnances de sortie d’hospitalisation sont d'ores et déjà envoyées dans Mon espace santé.
Aujourd'hui, de nombreuses prescriptions dématérialisées sont réalisées quotidiennement, sans qu’elles ne soient pour autant des Ordonnances numériques avec un code d'identification unique. Cet usage s’est largement répandu, avec notamment la généralisation des téléconsultations.
Dans ces cas-là, le prescripteur adresse ses ordonnances directement au patient, par messagerie ou dans son profil Mon espace santé. Celui-ci peut ensuite lui-même l’adresser par messagerie sécurisée à son pharmacien. Ces prescriptions dématérialisées comportent le paraphe du prescripteur (sans QR code Ordonnance numérique) et peuvent faire l’objet d’une délivrance par les pharmaciens.
Cette pratique est une tolérance actuelle qui aura vocation à disparaître avec la généralisation de l’Ordonnance numérique qui, avec son QR code d’identification unique et sa traçabilité complète, apportera la sécurisation attendue de ce dispositif.
La dématérialisation est encadrée par un cadre réglementaire propice et présente des bénéfices importants
Le cadre réglementaire actuel favorise l'engagement vers une dématérialisation complète possible
Ainsi, pour ce qui concerne la transmission des documents de santé clés au patient dans le cadre d’une prise en charge, en dehors :
de la lettre de liaison de sortie (et ce jusqu’à la mise à jour des textes réglementaire prévue) qui est soumise à une exigence réglementaire spécifique qui implique sa remise en main propre en papier au patient le jour de sa sortie,
des prescriptions, dont le processus de dématérialisation est en cours, notamment à travers le dispositif Ordonnance numérique (cf ci-dessus).
En dehors de 4 documents (Lettre de Liaison, compte-rendus de biologie, remise du dossier médical et ordonnance) qui dépendent de contextes légaux particuliers( Voir paragraphe précédent), tous les autres documents peuvent faire l’objet d’une remise dématérialisée.
Cette dématérialisation nécessite des modalités d’informations vis-à-vis des usagers. Tant que l’acculturation au numérique est en cours d’acquisition par la population générale, une possibilité de remise papier est préconisée pour les personnes qui en feraient spécifiquement la demande. L’objectif clé est que les personnes puissent disposer des informations de santé qui les concernent et ce, quel que soit le support.
La dématérialisation présente des bénéfices concrets
Avec le déploiement national de Mon espace santé, plus de 97% des usagers peuvent recevoir leurs documents de santé dans un environnement sécurisé. Ils en sont informés par le biais d’une notification.
Stockés de manière centralisée et sécurisée, ces documents essentiels ne seront plus perdus, renouvelés inutilement et permettront de faciliter la coordination entre les différents professionnels du parcours de soin.
Par ailleurs, des bénéfices écologiques et économiques pourront être observés pour les structures de la prise en charge.
Les bonnes pratiques recommandées pour s’engager pleinement dans la communication dématérialisée des documents de santé
La trajectoire vers la dématérialisation est une démarche qui doit s’accompagner d’actions concrètes et de précautions sur les usages
3 points sont notamment importants :
1. Un effort général d'information des patients afin qu'ils identifient Mon espace santé comme canal systématique de réception des documents et messages :
En avril 2024, 97% des français disposent d’un profil Mon espace santé ouvert, environ 17% s’y sont déjà connectés. Ce taux progresse de manière continue avec une ambition nationale que tous les français aient ouvert, consulté et agi sur leur carnet de santé numérique d’ici 2027. A cette fin, des campagnes de communication et d’accompagnement continueront d’être menées au niveau national, régional et local. Elles seront à destination du grand public et ciblées sur des profils de populations particulièrement engagées dans les parcours de santé (ex. malades chroniques, jeunes parents, femmes enceintes, personnes de plus de 65 ans, etc.).
2. Un accompagnement des professionnels de santé qui doivent percevoir les avantages réels de la dématérialisation dans les parcours de soin
De la même manière, le réseau des Ambassadeurs Mon espace santé continuera d’être animé et consolidé, pour agir au plus près des structures de prise en charge mais également dans les bouquets de services publics de base (Maison France Service, Conseiller France Service, etc.).
Il est essentiel que dans cette phase de montée en puissance des usages et dans le choix d’une stratégie de dématérialisation complète des envois, lesacteurs de santé, notamment les établissements intègrent systématiquement dans leurs parcours d’accueil des patients (au moment de la prise de RDV, des admissions, de l’accueil le jour J, de la sortie) une sensibilisation au rôle de Mon espace santé afin de ne laisser aucun usager de côté et de garantir la bonne réception des documents.
3. Une articulation avec les portails d’établissement / serveurs de résultats à clarifier
Comme indiqué dans le chapitre sur le sujet, Mon espace santé a vocation à être le service central de stockage des documents de santé, sans pour autant se substituer à des fonctionnalités offertes par des portails patients.
Afin d’assurer la lisibilité la plus optimale pour les patients, il est important d’anticiper une trajectoire de décommissionnement des fonctionnalités des services qui s’inscrivent en doublon de Mon espace santé. Il faudra également en anticiper la mise en œuvre technique et la déclinaison dans l’information transmise aux patients.
Réalistement, une période de coexistence des solutions est inévitable en attendant la montée en puissance de Mon espace santé. Attention, cependant : elle rend confuse l’ensemble du processus pour les patients. Le risque est donc de freiner l'usage du carnet de santé numérique par les patients dans la mesure où le document lui est remis simultanément en papier, via le portail et dans Mon espace santé.
La trajectoire 100% numérique ne doit se penser qu'avec l'information du patient
Depuis le début, les exigences logicielles Ségur ont pour vocation de garantir l’information du patient concernant l’alimentation et la consultation de son profil Mon espace santé : le patient doit pouvoir exprimer son opposition et conditionner ainsi le comportement du logiciel. Cette attention sera renforcée avec l'arrivée de la vague 2 du Ségur, qui va généraliser la consultation des données du patient par les professionnels.
Le patient doit être informé préalablement de l'accès (alimentation et consultation) à son profil Mon espace santé par un professionnel membre de son équipe de soins. Cet accès n'est autorisé et mis en œuvre que si le patient ne s'y est pas opposé. (Voir information pour alimentation)
Lorsque c’est possible, cette information et le recueil de l’opposition du patient sont réalisés en amont de la prise en charge du patient par le professionnel et au plus tard, au moment de la prise en charge (lors d’une prise rendez-vous, à l’admission ou à l’accueil, lors de la consultation).
L’information et l’opposition du patient sont enregistrées et s’appliquent à l’ensemble de l’équipe de soin prenant en charge le patient pendant la durée de l’épisode de soin, et non à la maille individuelle du professionnel.
Pour l’alimentation, le motif légitime n’est pas enregistré ni véhiculé dans les logiciels. Le professionnel peut changer le choix selon la discussion avec le patient sur le motif légitime, le patient peut également changer d’avis à tout moment de la prise en charge.
Le consentement du patient doit être recueilli explicitement à chaque nouvel accès de son profil Mon espace santé par un professionnel non membre de son équipe de soins.
Le patient peut s’opposer à l’alimentation s’il invoque un motif légitime (la légitimité du motif est à l’appréciation du professionnel).
Le patient peut s’opposer à la consultation sans avoir besoin d’invoquer de motif légitime.
Annexe : illustration de la logique de comportement des logiciels pour l'information patient
Extrait du cahier des charges des logiciels hospitaliers
Pour l’alimentation du DMP / MES :
Valeur par défaut : le professionnel / établissement peut alimenter le DMP / MES
Patient informé et non opposé : il peut alimenter le DMP / MES
Patient informé et opposé : il ne peut pas alimenter le DMP / MES
Pour la consultation du DMP / MES :
Valeur par défaut : le professionnel / établissement ne peut pas consulter le DMP / MES
Patient informé et non opposé : il peut consulter le DMP / MES
Patient informé et opposé : il ne peut pas consulter le DMP / MES
Exemple de texte d'information et d'action d'un utilisateur du logiciel métier pour l’information du patient